Le syndrome de l’imposteur

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Séverine Felley, Consultante pour une performance et un environnement de travail durables ; Ex. leader RH, Psychologue du Travail & des Organisations (FSP).

Qu’est-ce que le syndrome de l’imposteur ?

Décrit à la fin des années 70 par deux psychologues américaines, il désigne ce sentiment anxiogène de ne pas avoir de vraie légitimité pour occuper une place donnée. Et en conséquence, la crainte que cela soit découvert, c’est-à-dire que l’entourage réalise (finalement !) la méprise.  Dans un cadre professionnel, la personne qui en souffre pense être une sorte de fraude, arrivée au poste qui est le sien par chance, ou parce qu’elle est sympathique, ou par absence d’alternative au moment de sa promotion ou encore en réponse à un impératif de diversité.

Celui qui se voit comme un imposteur attribuera ses échecs à des facteurs qui lui sont propres (comme un manque de capacités, de persévérance, de talent, de …) et ses réussites à des facteurs situationnels extérieurs à lui (de la chance, la facilité de la mission, des attentes extérieures peu élevées, une erreur d’évaluation, de la discrimination positive etc…)

Contrairement à l’expérience commune d’un doute passager face à une nouvelle situation, le syndrome de l’imposteur est une expérience régulière et répétée, également dans des situations familières.

Quelles sont les conséquences possibles ?

D’un léger tracas à une anxiété prononcée, l’intensité de l’expérience de ce syndrome peut varier. De même, les répercussions sur le bien-être ainsi que sur le déroulé d’une vie privée et professionnelle vont être plus ou moins importantes.  

Laissez-moi vous décrire quelques manifestations typiques vécues par un imposteur présumé.

Le sentiment d’insécurité va entrainer chez notre imposteur de nombreuses discussions internes et toute une ribambelle de pensées et de questionnements. Tel un hamster dans sa roue qui ne s’arrête jamais de tourner, repassant en revue ce qu’il a dit ou fait, comment il l’a dit ou fait, à s’imaginer ce que « les gens » en ont pensé. Notre imposteur se retrouve aux prises avec ce tourbillon interne qui le prive d’une sérénité qui serait bienvenue, notamment au moment d’aller se coucher !

De plus, dans l’intention de compenser son incompétence présumée, notre imposteur va travailler très fort, s’investir énormément dans son travail afin de masquer son incompétence et ne pas être pris en défaut. Cela ouvre évidemment la porte à une fatigue physique et émotionnelle potentiellement importante.

A l’inverse, l’imposteur est un excellent candidat à la procrastination. Contrairement aux idées reçues, la procrastination provient rarement de la paresse ou d’un manque d’organisation. Elle est souvent une stratégie de choix, bien qu’inconsciente, pour éviter l’échec ou le préparer, en lui attribuant une origine autre qu’un manque de capacités. Si ce n’est tout simplement pas fait, ou fait trop tard, c’est une manière de détourner le regard d’une éventuelle incompétence.

Dans le doute de ses capacités, l’imposteur va également éviter de se mettre en porte-à-faux en prenant des positions trop affirmées, ou encore en proposant des idées dont l’accueil n’est pas certain. Il va également mettre en place des stratégies diverses et variées pour s’ajuster à son entourage et à ce qui est attendu, selon lui. Notre imposteur cherche souvent à plaire. Globalement, les situations conflictuelles seront soigneusement tenues à distance.

De même, puisque le syndrome se caractérise par une absence de foi en ses capacités, notre imposteur n’osera pas aspirer à certaines choses : de nouvelles responsabilités, un projet spécifique, un autre travail. Il ne demandera pas : ni augmentation de salaire, ni formation, ni promotion, … Ou au quotidien n’osera pas exprimer sa créativité, tenir un discours aspirationnel.  Trop en retrait, il se refuse une visibilité souvent nécessaire. Une expression résumera souvent son ressenti : « Je ne me sens pas légitime »

Il ne s’agit pas ici de nier la valeur d’une saine humilité ; le syndrome de l’imposteur prive la personne de réaliser ce dont elle est capable, de se mettre dans une relation d’égalité avec ses interlocuteurs et génère un sentiment d’insécurité.

Notre imposteur a donc un quotidien souvent bien fatigant et va créer son propre plafond de verre, jetant un voile sur son rayonnement naturel et ses possibilités.

Comment sortir de ce « Je ne suis pas légitime » ?

Plusieurs pistes de travail s’offrent à celles et ceux qui le souhaitent, l’objectif étant de modifier le point de vue que l’on a sur soi et de développer l’affirmation de soi. Il s’agira également de prendre conscience de certaines croyances sur soi ou sur le monde qui nous entoure, limitant le champ des possibles.

3 pistes de réflexions pour remédier au syndrome de l’imposteur :

Accomplissements et compétences

Prendre conscience de vos talents et réussites et reconnaître leur valeur : il est essentiel de vous réapproprier ce que vous savez faire et avez la capacité de faire. En substance, il s’agira d’une réflexion en 2 axes : 1) Etablir une liste des réussites et accomplissements passés, en considérant les sphères privées et professionnelles. 2) Identifier les compétences qui sont les vôtres et qui ont soutenu ces réalisations.

Un petit rituel également efficace et bienfaisant : à la fin de chaque journée, identifiez 1-2 choses que vous avez bien faites ce même jour.

Les dialogues internes

Ensuite, il est très utile de porter attention aux dialogues internes. D’une part, dans le cadre du syndrome de l’imposteur, le dialogue intérieur est souvent dévalorisant et dépourvu de nuances. À la suite de l’écoute attentive de ces discussions, l’enjeu est d’adopter une manière de se parler constructive et bienveillante. De la même manière dont vous vous adressez à un ami.

Une autre tendance sera d’imaginer ce que les autres pensent (et bien sûr, ils pensent rarement du positif). Arrêtez ! A moins d’avoir un réel don, vous ne le saurez qu’en leur demandant. Tout le reste relève d’un masochisme, involontaire certes, mais terriblement néfaste et énergivore.

Les valeurs pour oser

Je crois fermement à l’impact de réfléchir à ses valeurs. Cette réflexion met en évidence un socle pour assurer la cohérence de ses actions en donnant le courage qui manque parfois pour agir ou s’exprimer. Si on cherche une plus forte affirmation de soi, les valeurs nous offrent une motivation, une bonne raison d’oser.

En conclusion, le syndrome de l’imposteur peut réellement enlever de sa saveur à notre quotidien en nous privant de tout un champ de possibles tant dans les sphères privées que professionnelles. Or, il est parfaitement possible de lui opposer une parade et ainsi trouver plus de sérénité et l’opportunité d’accomplir ce qui nous tient à cœur. Je laisse le dernier mot au Dalai Lama Tenzin Gyatso « La confiance en soi et la capacité de se tenir debout seul me paraissent essentielles pour réussir notre vie. Je ne parle pas d‘une assurance stupide, mais d‘une conscience de notre potentiel intérieur, une certitude que nous pouvons toujours nous corriger, nous améliorer, nous enrichir, et que rien n‘est jamais perdu »

Questionnaire disponible en ligne : Echelle de Clance (en anglais)

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