Et si on changeait de cadre pour mieux avancer?

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Séverine Felley, Consultante pour une performance et un environnement de travail durables ; Ex. leader RH, Psychologue du Travail & des Organisations (FSP).

Que ferais-tu si tu n’avais pas peur ? c’est la question que l’on m’a posée, il y a peu, dans le cadre d’une remise en question professionnelle.

Cette question fut un vrai catalyseur ; et je me suis demandé comment une simple question pouvait avoir un tel effet. Comprendre d’où venait cette magie, ce « moment ah-ah ».

Mécanisme indispensable à notre survie, résultante d’expériences de vie ou d’apprentissage, menaces réelles ou imaginées, tout du moins amplifiées, la peur nous protège et nous immobilise.  Peur du rejet, de la solitude, du regard de l’autre, de n’être pas assez ceci ou d’être trop cela, de décevoir, d’échouer, de l’incertitude, de perdre ce que l’on possède, d’avoir mal au cœur ou au corps, … bref une page n’y suffirait pas. L’ensemble de ces peurs impacte nos décisions et nos comportements au quotidien.

De nombreuses recherches en psychologie et en neurosciences se sont intéressées au lien entre les émotions, notamment la colère, la tristesse, la joie, la peur, et la prise de décision ou d’autres processus cognitifs. Les travaux portant sur la théorie de l’évaluation cognitive postulent qu’une émotion est définie par l’évaluation d’une situation selon certains critères, tels que le plaisir, l’incertitude, la responsabilité individuelle dans l’évènement et si la survenue de cet évènement dépend de l’individu ou du contexte (voir notamment Smith & Ellsworth). A titre d’exemple, la peur sera définie par l’évaluation d’une situation comme négative, incertaine et dans laquelle on ne ressent qu’un faible contrôle. Dit autrement, la pensée précède l’émotion.

En retour, une émotion donnée va influencer de manière spécifique jugements et choix du fait de leur rôle dans la perception du risque (Lerner & Kelter 2000). La peur nous amenant à surestimer les risques, il est possible que nous privilégiions les options qui nous semblent moins risquées, favorisant une sensation de contrôle. Autrement dit, nous allons surestimer les risques de l’action, et les bénéfices à maintenir le statu quo. Statu quo que l’on peut assimiler à ce que l’on nomme parfois notre zone de confort. Il y a pourtant quelque chose de paradoxal à nommer zone de confort une situation que l’on songe à quitter. Tout compte fait, elle n’est peut-être pas si confortable ?

Vous l’avez compris, bien qu’étant un mécanisme de survie indispensable, selon cette approche, la peur est également le résultat de notre propre évaluation d’une situation et donc subjective. Là où nous pensons être rationnels en pondérant les différents éléments de notre prise de décision, et bien nous sommes finalement limités par le cadre que nous imposent nos craintes. Il ne s’agit évidemment pas de retirer toute émotion de notre réflexion. Si la science a d’abord tenté d’expliquer notre fonctionnement selon le modèle d’un être humain purement rationnel, la neuropsychologie a démontré que paradoxalement les émotions sont indispensables à notre rationalité (voir notamment A. Damasio, l’Erreur de Descartes).

Reconnaitre et nommer ses peurs n’est pas une formule magique pour le succès. Cela ne rend pas le chemin facile, ça le rend possible. Cette prise de conscience nous permet de recadrer notre réflexion en considérant la situation de manière plus large et avec une autre perspective. Au lieu de fermer des portes, on trouve des clés. C’est une tout autre discussion que vous ouvrez avec vous-même et qui encouragera l’action.

Se poser de bonnes questions est un premier pas dans ce changement de perspective et l’opportunité de prendre conscience de certaines de nos distorsions cognitives. Il est fascinant de constater la marge de manœuvre que nous rend une prise de conscience.

Des grandes décisions de vie aux choix du quotidien, une prise de recul nous permettra d’avancer. Nous nous mettons tellement de freins ; cela peut être de ne pas mettre un pull rose, de ne pas danser sur un morceau que nous adorons car la piste de danse est déserte, ne pas donner son opinion par peur des réactions ou du ridicule, ne pas demander une promotion, ne pas refuser une invitation, ne pas prendre un congé sabbatique, devenir indépendant(e) ; la liste est longue et je vous laisse la compléter avec vos propres expériences. Pour ma part, je les ai toutes vécues et aujourd’hui j’ai le sentiment d’avancer. Avec mes baskets jaunes et les vêtements que j’ai envie de porter, je prends un nouveau virage professionnel. Et je publie même un premier article sur LinkedIn.

En répondant à cette question « que ferais-tu si tu n’avais pas peur ? » j’ai ouvert une fenêtre sur un futur qui m’a fait envie. J’ai devant moi des obstacles, des étapes, des apprentissages, des moments de doute certainement. Mais je peux les anticiper, me préparer. Répondre à ces questions nous permet de changer de cadre. « Ce qui trouble les hommes ce ne sont pas les choses mais le jugement qu’ils portent sur ces choses » disait Epictète. En étant conscients de nos peurs, nous gagnons ainsi une capacité à considérer la situation, et le chemin à parcourir, de manière différente.

Alors au prochain carrefour, essayez !

1- Que feriez-vous si vous n’aviez pas peur ? pour vous donner envie et comprendre ce qui vous retient.

2- Que pourrait-il arriver de pire si vous agissez ? peut-être que les risques ne sont pas si grands, qu’il y a bien des manières de les gérer ?

3- Et que peut-il arriver de mieux si vous n’agissez pas ? le statu quo vous paraîtra peut-être moins attractif.

Un petit pas peut faire une grande différence

Publié sur LinkedIn le 19 mars 2021 – (2) Et si on changeait de cadre pour mieux avancer? | LinkedIn

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